Portrait d’instit’ : Nadine Fleischmann « Observer les élèves et surtout les écouter, c’est la clé »

Nadine Fleischmann, chef d’établissement de l’école Emilie Brandt et enseignante depuis 43 ans, dont 33 ans en classe de CM2.
A l’aube de son départ en retraite, Nadine partage avec nous quelques souvenirs.

« Melle Roustin était toujours en recherche pour accompagner tous nos élèves.  L’éducation, la pédagogie étaient toute sa vie. »

Comment t’es-tu lancée dans le métier d’enseignante ? (ton parcours, tes espoirs…)

Après le Bac, j’ai suivi des cours à la fac en psychologie, puis 2 ans d’école Montessori. Au départ je souhaitais devenir Educatrice spécialisée pour les enfants handicapés. Après plusieurs expériences dans ce domaine j’ai compris que mon émotivité ne me permettrait pas de continuer dans cette voie.

Diplôme Montessori en poche, j’ai postulé dans diverses écoles, dont Emilie Brandt. C’est Mademoiselle Roustin qui m’a recrutée. En 1978 j’intègre donc l’école qui était encore à l’époque rue Mathilde Giraud.

Le projet d’école m’intéressait car il y avait du Montessori mais pas que, il y avait du Decroly, du Freinet… On faisait de l’imprimerie, il y avait plein de projets (histoire, sciences…). Melle Roustin était toujours en recherche pour accompagner tous nos élèves.  L’éducation, la pédagogie étaient toute sa vie. Nous avions été formés au code binaire pour apprendre la logique aux enfants (à l’époque à Emilie Brandt, on ne comptait pas encore en base 10 pour donner du sens afin de ne pas mécaniser les enfants et apprendre à compter dans toutes les bases. Tout comme la grammaire, nous faisions de la linguistique en utilisant les symboles Montessori.

« Je ne me suis jamais sentie « maitresse d’école » »

Après toutes ces années d'enseignement, est-ce que ton regard a changé par rapport à ton idée de départ sur le métier ?

Il faut vivre avec son temps et surtout observer les enfants. Un enfant reste un enfant. Mon regard a obligatoirement changé de par mon expérience et mes nombreuses formations.

J’ai beaucoup travaillé en neurophysiologie, avec un travail sur le corps pour détendre les enfants, leur permettre d’être apaisés et la Discipline Positive aussi m’a beaucoup apportée. J’ai décidé de faire entrer la DP à l’école car cela correspondait à la philosophie Montessori (« apprends-moi à faire seul », développement de l’autonomie, pas de punition mais une réflexion pour trouver des solutions…) et que cela apportait des outils en plus.

Je suis restée très Montessorienne dans ma philosophie. Travail individuel, créer des outils pour des enfants atypiques… Je suis celle qui aide (être assise sur une chaise et vers qui l’enfant vient). Je ne me suis jamais sentie « maitresse d’école ». J’accompagne les enfants, je m’assois parmi eux. Je leur laisse le droit à l’erreur et je leur apprends aussi à reconnaitre leurs erreurs. Je leur apprends qu’avoir des exigences et de la rigueur sont des valeurs importantes.

Mon rôle est de les amener au-delà d’eux-mêmes et aussi de rire ensemble, s’amuser. C’est tellement long une journée d’école !

Quelles ont été les années les plus fortes ?

Les premières années avec mademoiselle Roustin qui m’a appris à travailler autant avec les élèves qu’en direction – des années très constructives mais dures.

Mes années où je suis repartie à la fac avec des enfants en bas âge, la classe, et du chemin pour arriver à l’école, j’habitais à Montmagny à l’époque.

Et puis surtout l’arrivée de la Discipline Positive qui a généré un élan et une réflexion commune autour de l’enfant.

Parmi toutes les classes vertes que tu as vécues, laquelle t’a le plus marquée ?

En 2003, je suis partie pour la première fois au Québec avec ma classe, j’y suis allée 13 fois et à chaque fois ce fut merveilleux de voir le bonheur des enfants durant ces séjours magiques dans la neige.

Le Québec c’est aussi des rencontres avec des gens d’une humanité extraordinaire, les amérindiens (Shall avec qui j’ai fumé le calumet de la paix), les animateurs québécois (Matthieu le trappeur et tellement d’autres) … Avec une autre philosophie de vie.

Le seul bémol là-bas était le temps infini passé avec les enfants à s’habiller et se déshabiller.

Ce que tu emportes d’Emilie Brandt ?

Beaucoup de souvenirs, des adultes avec lesquels j’ai créé des liens forts, des élèves reconnaissants, des parents supers.

L’impression d’avoir posé une petite pierre qui continuera dans l’esprit du respect, de l’écoute et de la bonne humeur.

« garder en tête que même en fin de carrière on ne sait rien »

Un conseil pour un jeune professeur débutant(e) ?

Savoir observer, c’est la base ! Prendre du temps pour observer les enfants et les écouter.

Poser des questions aux collègues et aux enfants. Accepter les conseils et oser dire lorsque l’on ne sait pas. Toujours se poser des questions, chercher à se former et garder en tête que même en fin de carrière on ne sait rien.

Quels sont les ingrédients pour une vie dans la classe soit harmonieuse ?

Créer l’ambiance.

Poser le cadre et donner de la liberté dans ce cadre.

Ecouter les élèves.

Faire des projets.

Instituer des conseils de classe (TEC) hebdomadaires voire plus si besoin

Donner du sens. Toujours !

C’est quoi le secret pour gérer les enfants qui demandent beaucoup d’attention ?

Il n’y a pas de secret. De l’écoute, bien cerner sa problématique. Travailler en partenariat avec les personnes aidantes.

Aménager le travail, le temps.

Mettre du matériel adapté à sa disposition.

L’encourager.

Et être humble et patient !

Propos recueillis par Alexandra Landais

Portrait chinois

Si j’étais un animal, je serais une tortue

Si j’étais un livre, je serais un roman policier

Si j’étais une chanson, je serais « Let it Be » des Beatles

Si j’étais une matière enseignée à l’école, je serais l’histoire

Si j’étais un paysage, je serais une montagne

Si j’étais un pays, je serais le Canada

Si j’étais un bruit, je serais le vent

Si j’étais un plat, je serais la meringue

Si j’étais un personnage de fiction, je serais, d’après les enfants je serais Wonder Woman, mais je m’imagine plus en Mary Poppins